Dimanche 11 Septembre 2016 : Poladura de la Tercia > Pajares  (15 km)

Etape 22 /38


    Vision

    Musique - encens - parfums..., poisons..., littérature !...
    Les fleurs vibrent dans les jardins effervescents ;
    Et l'Androgyne aux grands yeux verts phosphorescents
    Fleurit au charnier d'or d'un monde en pourriture.

    Aux apostats du Sexe, elle apporte en pâture,
    Sous sa robe d'or vert aux joyaux bruissants,
    Sa chair de vierge acide et ses spasmes grinçants
    Et sa volupté maigre aiguisée en torture.

    L'archet mord jusqu'au sang l'âme des violons,
    L'art qui râle agité d'hystériques frissons
    En la sentant venir a redressé l'échine...

    Le stigmate ardent brûle aux fronts hallucinés.
    Gloire aux sens ! Hosanna sur les nerfs forcenés.
    L'Antéchrist de la chair visite les damnés...

    Voici, voici venir les temps de l'Androgyne.

    Albert Samain
    (Recueil : Le chariot d'or)

     

 

"Ce qui est douloureux, c'est qu'il est impossible d'expliquer quelque chose
à quelqu'un qui ne l'a pas déjà compris.
On peut seulement parler à quelqu'un qui en a le pressentiment
et qui souffre de ne pas avoir de lumières là-dessus."
Christian Bobin

 





Les montagnes émergent de la brume...
L'ascencion est une élévation de l'âme







Moment rare que ce Camino offre au pèlerin ébloui !






Les compagnons arrivent à ce premier sommet ( La Cruz del Alto de los Romeros)


Il ne manque plus que moi...


Ca y est, je suis arrivé !  -


La photo de notre petite communauté s'impose !


La Croix Jacquaire à l'Alto de los Romeros qui restera pour moi le lieu emblématique de ce Camino


Le spectacle ne cesse de m'émerveiller !

  
Des rencontres imprévues...



L'autre versant de la montagne offre de nouveaux panoramas...






Les pentes herbeuses jalonnées de nombreux sentiers...


Je traverse l'Arroyo de Valle Madera


Iglesia de Venta Pajares


Les alpages que sillonnent de nombreux ruisseaux


Les sommets au loin (Picos de Europa ?)


Panoramique qui montre l'ampleur de cette chaîne de montagnes

                                          
Le balisage est très correct !


Un beau sous-bois pour finir l'étape





J'arrive en vue de Pajares

             
La Iglesia de Pajares                                  
 


    La plus belle étape de ce Chemin et j'oserai dire de tous les Chemins que j'ai parcourus !

    Je quitte l'Albergue à 7h15. On part tous un peu groupés, il fait encore nuit, aussi  j'ai ma lampe frontale.
    L'itinéraire commence par un sentier en montée à peine visible au milieu des prés, puis peu à peu cela
    devient de plus en plus raide... Le jour se lève et les montagnes se colorent de ces belles teintes de l'aube.
    Le spectacle de minute en minute devient plus spectaculaire...Il y a maintenant les rayons du soleil qui
    émergent au dessus des sommets pour ajouter des touches de rose et de rouge sur cette palette géante !
    Cela continue à monter assez raide jusqu'à l'Alto de los Romeros visible de loin de par la croix qui y est
    érigée. Mes compagnons y sont déjà parvenus alors que je peine encore dans la montée, mais je prends
    mon temps, photos, contemplation, rêverie poétique...

    Je rejoins enfin le groupe à ce premier sommet où nous faisons une photo au pied de cette croix qui
    porte les insignes jacquaires. Nous avons de là-haut une vue spectaculaire sur toutes les montagnes
    environnantes qui émergent des lacs de brume avec les rayons de soleil qui les font resplendir !
    Je fais encore quelques photos avec le Canadien puis je laisse partir tout le groupe pour continuer
    cette étape en solitaire.

    Il y a une première descente au milieu des alpages au long d'un sentier au milieu des genêts et des
    bruyères, puis j'attaque la deuxième montée pour arriver au point le plus élevé à 1572 m (Canto la Tusa).
    Le spectacle est d'une telle beauté que je ne ressens ni la fatigue, ni le poids du sac !

    Il y a ensuite une belle descente assez raide en suivant un sentier à flanc de montagne et à nouveau
    une montée pour atteindre Vista Arbas à 1560 m. Il y a sur les pentes de ces alpages des vaches
    qui broutent ici et là sans trop se soucier de notre passage...

    A nouveau une descente vers l'Arroyo de Valle Madera où je prends un bon temps de repos.
    C'est ensuite un sentier qui traverse les pentes couvertes de genêts en fleur et de bruyères...
    J'atterris à Arbas del Puerto sur la Nationale 630 que je vais suivre sur quelques centaines de mètres
    jusqu'à Venta Pajares. Là, je retrouve un sentier en montée pour déboucher sur un flanc de montagne
    que je vais descendre au milieu des vaches et des abreuvoirs. En face je crois apercevoir les sommets
    les plus élevés de la Cordillère Cantabrique, les Picos de Europa ! Je fais à nouveau une pause sur
    ces pentes herbeuses et je me restaure avec des restes du dîner d'hier soir que j'avais mis dans un pot.

    Je traverse à nouveau la Nationale, puis j'aborde maintenant la longue descente qui va me conduire
    jusqu'à l'étape. Sentier en zig-zag assez raide à flanc de montagne, passage au milieu des fougères
    et j'entre alors dans un beau sous-bois où se dressent fièrement des hêtres magnifiques...
    Des prés, des passages boueux à cause des ruisseaux qui descendent des hauteurs et je rejoins une
    piste qui me conduit directement à Pajares qui se trouve à 990 m d'altitude.

    Je vais ensuite tout droit à l'Albergue et après le rituel, douche, lavage et repos, je monte sur la
    Nationale qui passe juste au-dessus du pueblo où je retrouve Paco, Lola et Jose. Nous partageons
    une bonne cerveza et même un chupito de Orujo de Hierbas bien que ce ne soit pas l'heure !
    Je retourne ensuite me reposer et mettre à jour mes notes...

    Le soir nous dînons tous ensemble : Il y a 1 Canadien, 3 Espagnols d'Albacete, 1 couple Basque,
    1 couple de Majorque, 2 autres Espagnols et 1 Français (moi !) Une bonne soirée entre pèlerins !
     

 

Un sommet sous les feux du soleil levant
 

 


Hébergement à l'Albergue de Peregrinos de Pajares
Tél. 645 930 092
Ouverte toute l'année - Prix 7 euros
14 lits avec étages -

( 3 coquilles)
 



    Berceuse

    Première-Née - temps de l'oriole,
    Première-Née - le mil en fleurs,
    Et tant de flûtes aux cuisines...
    Mais le chagrin au coeur des Grands
    Qui n'ont que filles à leur arc.

    S'assembleront les gens de guerre,
    Et tant de sciences aux terrasses...
    Première-Née, chagrin du peuple,
    Les dieux murmurent aux citernes,
    Se taisent les femmes aux cuisines.

    Gênait les prêtres et leurs filles,
    Gênait les gens de chancellerie
    Et les calculs de l'astronome:
    "Dérangerez-vous l'ordre et le rang?"
    Telle est l'erreur à corriger.

    Du lait de Reine tôt sevrée,
    Au lait d'euphorbe tot vouée,
    Ne ferez plus la moue des Grands
    Sur le miel et sur le mil,
    Sur la sébile des vivants...

    L'ânier pleurait sous les lambris,
    Oriole en main, cigale en l'autre:
    "Mes jolies cages, mes jolies cages,
    Et l'eau de neige de mes outres,
    Ah! pour qui donc, fille des Grands?"

    Fut embaumée, fut lavée d'or,
    Mise au tombeau dans les pierres noires:
    En lieu d'agaves, de beau temps,
    Avec ses cages à grillons
    Et le soleil d'ennui des Rois.

    S'en fut l'ânier, s'en vint le Roi!
    "Qu'on peigne la chambre d'un ton vif
    Et la fleur mâle au front des Reines..."
    J'ai fait ce rêve, dit l'oriole,
    D'un cent de reines en bas âge.

    Pleurez, l'ânier, chantez l'oriole,
    Les filles closes dans les jarres
    Comme cigales dans le miel,
    Les flûtes mortes aux cuisines
    Et tant de sciences aux terrasses.

    N'avait qu'un songe et qu'un chevreau
    - Fille et chevreau de même lait - 
    N'avait l'amour que d'une Vieille.
    Ses caleçons d'or furent au Clergé,
    Ses guimpes blanches à la Vieille...

    Très vieille femme de balcon
    Sur sa berceuse de rotin,
    Et qui mourra de grand beau temps
    Dans le faubourg d'argile verte...
    "Chantez, ô Rois, les fils à naître!"

    Aux salles blanches comme semoule
    Le Scribe range ses pains de terre.
    L'ordre reprend dans les grands Livres.
    Pour l'oriole et le chevreau,
    Voyez le Maître des cuisines.


    Saint-John Perse

     


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