Lundi 7 Septembre 2015 : Toledo


TOLEDE
 



    Extrait de la  "Prose du Transsibérien et de la Petite Jeanne de France"

    "Blaise, dis, sommes-nous bien loin de Montmartre ?"

    Nous sommes loin, Jeanne, tu roules depuis sept jours
    Tu es loin de Montmartre, de la Butte qui t'a nourrie, 
    du Sacré Coeur contre lequel tu t'es blottie
    Paris a disparu et son énorme flambée
    Il n'y a plus que les cendres continues
    La pluie qui tombe
    La tourbe qui se gonfle
    La Sibérie qui tourne
    Les lourdes nappes de neige qui remontent
    Et le grelot de la folie qui grelotte comme un dernier désir dans l'air bleui
    Le train palpite au coeur des horizons plombés
    Et ton chagrin ricane... 

    "Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ?"

    Les inquiétudes
    Oublie les inquiétudes
    Toutes les gares lézardées obliques sur la route
    Les fils télégraphiques auxquels elles pendent
    Les poteaux grimaçants qui gesticulent et les étranglent
    Le monde s'étire s'allonge et se retire comme un accordéon 
    qu'une main sadique tourmente
    Dans les déchirures du ciel, les locomotives en furie 
    S'enfuient 
    Et dans les trous,
    Les roues vertigineuses les bouches les voix
    Et les chiens du malheur qui aboient à nos trousses
    Les démons sont déchaînés
    Ferrailles
    Tout est un faux accord
    Le broun-roun-roun des roues
    Chocs
    Rebondissements
    Nous sommes un orage sous le crâne d'un sourd...

    "Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ?"

    Mais oui, tu m'énerves, tu le sais bien, nous sommes bien loin
    La folie surchauffée beugle dans la locomotive
    La peste, le choléra, se lèvent comme des braises ardentes 
    sur notre route
    Nous disparaissons dans la guerre en plein dans un tunel
    La faim, la putain, se cramponne aux nuages en débandade 
    Et fiente des batailles en tas puants de morts
    Fais comme elle, fais ton métier...  

    "Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ?" 

    Oui, nous le sommes, nous le sommes
    Tous les boucs émissaires ont crevé dans ce désert
    Entends les sonnailles de ce troupeau galeux Tomsk 
    Tcheliabinsk  Kainsk  Obi  Taïchet  Verkné  Oudinsk 
    Kourgane  Samara  Pensa-Touloune  
    La mort en Mandchourie
    Est notre débarcadère est notre dernier repaire
    Ce voyage est terrible
    Hier matin
    Ivan Oullitch avait les cheveux blancs
    Et Kolia Nicolaï Ivanovitch se ronge les doigts 
    depuis quinze jours...
    Fais comme elles la Mort la Famine fais ton métier
    Ca coûte cent sous, en transsibérien, ça coûte cent roubles
    En fièvre les banquettes et rougeoie sous la table
    Le diable est au piano
    Ses doigts noueux excitent toutes les femmes
    La Nature
    Les Gouges
    Fais ton métier 
    Jusqu'à Kharbine...  

    Blaise Cendrars




  
En descendant vers le bas de la ville pour repérer la sortie de la prochaine étape...


   
La Puerta del Sol

Quelques photos de la Cathédrale Sainte-Marie de Tolède

 


 



















La belle statue de Saint-Jacques dans la Cathédrale


Rétable du maître-autel de la Cathédrale


Quelques oeuvres du peintre El Greco...

    


     



Une peinture de Francisco de Goya


La tour de la Cathédrale


Vue plongeante du haut de la tour sur la plaza del Consistorio


La Cloche au sommet de la tour




    La Vierge de Tolède

    On vénère à Tolède une image de Vierge, 
    Devant qui toujours tremble une lueur de cierge ; 
    Poupée étincelante en robe de brocart, 
    Comme si l'or était plus précieux que l'art ! 
    Et sur cette statue on raconte une histoire 
    Qu'un enfant de six mois refuserait de croire, 
    Mais que doit accepter comme une vérité 
    Tout poète amoureux de la sainte beauté.

    Quand la Reine des cieux au grand saint Ildefonse, 
    Pour le récompenser de la grande réponse, 
    Quittant sa tour d'ivoire au paradis vermeil, 
    Apporta la chasuble en toile de soleil, 
    Par curiosité, par caprice de femme, 
    Elle alla regarder la belle Notre-Dame, 
    Ouvrage merveilleux dans l'Espagne cité, 
    Rêve d'ange amoureux, à deux genoux sculpté, 
    Et devant ce portrait resta toute pensive 
    Dans un ravissement de surprise naïve. 
    Elle examina tout : — le marbre précieux ; 
    Le travail patient, chaste et minutieux ; 
    La jupe raide d'or comme une dalmatique ; 
    Le corps mince et fluet dans sa grâce gothique ; 
    Le regard virginal tout baigné de langueur, 
    Et le petit Jésus endormi sur son cœur. 
    Elle se reconnut et se trouva si belle, 
    Qu'entourant de ses bras la sculpture fidèle, 
    Elle mit, au moment de remonter aux cieux, 
    Au front de son image un baiser radieux.

    Ah ! que de tels récits, dont la raison s'étonne 
    Dans ce siècle trop clair pour que rien y rayonne, 
    Au temps de poésie où chacun y croyait, 
    Devaient calmer le cœur de l'artiste inquiet ! 
    Faire admirer au ciel l'ouvrage de la terre, 
    Cet espoir étoilait l'atelier solitaire, 
    Et le ciseau pieux longtemps avec amour 
    Pour le baiser divin caressait le contour. 
    Si la Vierge, à Paris, avec son auréole, 
    Sur les autels païens de notre âge frivole 
    Descendait et venait visiter son portrait, 
    Croyez-vous, ô sculpteurs, qu'elle s'embrasserait ?

    Théophile Gautier
     



    
Saint-Jacques Matamore                                                
Statue de Miguel de Cervantes



La Plaza de Zocodover


Les mariés chinois...


Don Quichotte


L'Alcazar de Tolède


    Je passe la matinée, après avoir repéré le chemin que je vais suivre demain matin pour sortir de la ville, dans la Cathédrale
    qui est une merveille d'architecture et qui recèle des oeuvres de toute beauté... VOIR LE SITE.
    Je grimpe ensuite à la Tour
    d'où j'embrasse à 360 ° la ville et les alentours. Puis je vais au sud-ouest de la vieille ville
    déjeuner sur la Plaza del Conde où se trouve l'église
    Santo Tomé que je vais ensuite visiter et où l'on peut admirer entre
    autres  
    "L'enterrement du Comte d'Orgaz" l'un des chefs-d'oeuvre du peintre El Greco.

    Je visite ensuite la Iglesia del Salvador, la plus ancienne église de Tolède
    construite sur les vestiges d'une ancienne
    mosquée. Je déambule ensuite dans ces petites rues qui s'entrecroisent et
    s'emmêlent au cœur de la vieille cité avant d'aller
    au
    Musée de Santa Cruz proche de la Plaza de Zocodover où j'ai pu admirer entre autres quelques belles oeuvres du Greco.

    Je dîne ensuite dans ce même quartier où il y a beaucoup de restaurants et je retourne à l'albergue où je rencontre
    dans la chambre un chinois étudiant en Allemagne avec lequel j'ai
    quelques échanges très instructifs concernant son pays,
    le mode de vie et l'évolution de la société.


    Comme cet albergue est équipée de la WIFI, j'envoie des photos sur le site de notre association du Var, sur Facebook
    ainsi que quelques mails à ma compagne, à la famille et aux amis.
     

 


Hébergement à l'Albergue Juvenil Pascuales
Cuesta de Pascuales, 8  - Situation centrale près de l'hôtel Alfonso VI
Chambres de 4 lits
Nuit avec petit-déjeuner : 13,50 euros
 



    Extrait de la  "Prose du Transsibérien et de la Petite Jeanne de France"

    Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ?

    Non mais... fiche-moi la paix... laisse-moi tranquille
    Tu as les hanches angulaires
    ton ventre est aigre et tu as la chaude-pisse
    c'est tout ce que Paris a mis dans ton giron
    C'est aussi un peu d'âme... car tu es malheureuse
    J'ai pitié j'ai pitié viens vers moi sur mon cœur
    Les roues sont les moulins à vent du pays de Cocagne
    et les moulins à vent sont les béquilles qu'un mendiant
    fait tournoyer
    Nous sommes les cul-de-jatte de l'espace
    Nous roulons sur nos quatre plaies
    On nous a rogné les ailes,
    les ailes de nos sept péchés
    Et tous les trains sont les bilboquets du diable
    Basse-cour
    Le monde moderne
    La vitesse n'y peut mais
    le monde moderne
    les lointains sont par trop loin
    et au bout du voyage c'est terrible d'être un homme 
    avec une femme... 

    Blaise, dis, sommes-nous bien loin de Montmartre ?

    J'ai pitié j'ai pitié viens vers moi  je vais te conter une histoire
    Viens dans mon lit
    Viens sur mon cœur
    Je vais te conter une histoire...

    Oh viens ! viens !

    Aux Fidji règne l'éternel printemps 
    La paresse
    L'amour pâme les couples dans l'herbe haute
    et la chaude syphilis rôde sous les bananiers
    Viens dans les îles perdues du Pacifique !
    Elles ont nom du Phénix, des Marquises,
    Bornéo et Java
    Et Célèbes à la forme d'un chat.

    Nous ne pouvons pas aller au Japon
    Viens au Mexique !
    Sur ses hauts plateaux les tulipiers fleurissent
    Les lianes tentaculaires sont la chevelure du soleil
    On dirait la palette et les pinceaux d'un peintre
    Des couleurs étourdissantes comme des gongs, 
    Rousseau y a été
    il y a ébloui sa vie
    C'est le pays des oiseaux
    L'oiseau du paradis, l'oiseau-lyre
    Le toucan, l'oiseau moqueur
    Et le colibri niche au cœur des lys noirs
    Viens !
    Nous nous aimerons dans les ruines majestueuses d'un temple aztèque
    Tu seras mon idole
    Une idole bariolée enfantine un peu laide et bizarrement étrange
    Oh viens !

    Si tu veux nous irons en aéroplane et nous survolerons
    Le pays des mille lacs,
    Les nuits y sont démesurément longues
    L'ancêtre préhistorique aura peur de mon moteur
    J'atterrirai
    Et je construirai un hangar pour mon avion avec les os fossiles de mammouth
    Le feu primitif réchauffera notre pauvre amour
    Samowar
    Et nous nous aimerons bien bourgeoisement près du pôle
    Oh viens !

    Jeanne Jeannette Ninette nini ninon nichon
    Mimi mamour ma poupoule mon Pérou
    Dodo dondon
    Carotte ma crotte
    Chouchou p'tit coeur
    Cocotte
    Chérie p'tite chèvre
    Mon p'tit péché mignon
    Concon
    Coucou
    Elle dort

    Blaise Cendrars
     


Saint-Jacques Matamore dans la Cathédrale de Tolède

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