COMMENT, EN 1208, FRANCOIS, COMPRIT LA VRAIE PAUVETE
(Suite)
Nous connaissons tous l’expression « vivre d’amour et d’eau
fraîche », un peu poussée, bien sûr, mais significative. Quand on aime… on ne
compte pas ! et on est prêt à tout pour ce qu’on aime, et ça nous dynamise, ça
nous donne « la pêche » ! François et ses compagnons sont devenus des
vagabonds, des SDF, des gens qui ne s’installent nulle part, des « nomades de
l’Evangile » ; ils ont compris que pour changer les mentalités, on ne peut pas
rester enfermé dans sa maison, dans son couvent ou dans son église. Pour citer
800 ans avant, une expression d’un autre François venu du bout du monde, ils
ont compris qu’il faut aller « vers les périphéries ». Pas de paroles vides !
des actes concrets ! Il faut exprimer la solidarité, la compassion par le SERVICE,
en commençant par les plus pauvres !
En ce qui les concerne, ils s’installent à
Rivo Torto, près du torrent, dans une cabane couverte de feuillages. Ils sont
12, et François de dire : « Comme point de départ pour le Paradis, ce sera
mieux qu’un palais » ! Il paraît que les passants les entendent rire et chanter
dans ce vrai purgatoire où règnent autant le gel que la canicule. C’est si
petit qu’ils ne peuvent pas s’étendre tous ensemble pour dormir ! Leur vêtement
est celui des pauvres : tunique grise, pieds nus, corde à la ceinture (on les
appellera les Cordeliers). Quant à la nourriture, elle est frugale mais, comme
dit François, « Frère Ane (le corps !) a besoin d’une juste ration de vivres et
de sommeil ! » Ils resteront dans leur cabane jusqu’à ce qu’un paysan les en
chasse … pour y loger son âne ! Après les cavernes cachées dans les bois
(Carceri), la petite communauté s’installera à la Portioncule, à côté de la
minuscule chapelle réparée par François. François interdit donc à ses frères de
recevoir de l’argent et d’en posséder, sauf pour soigner les malades. Les
frères doivent travailler de leurs mains : en échange ils recevront de quoi se
nourrir, mais surtout pas d’argent. « L’argent, ce n’est pas mieux que du
fumier ! » s’exclame-t-il. Le détachement de tous les biens inutiles devient un
style de vie, la pauvreté devient une attitude du cœur, c’est ainsi que l’on
grandit en liberté face aux esclavages liés à l’argent. Et François, avec
délicatesse, leur apprend l’art de mendier, en commençant par leur donner
l’exemple. Il sait que leur orgueil en prend un coup à chaque fois qu’ils
tendent la main et qu’on les reconnaît, eux qui avaient une belle situation, et
qui sont devenus «frères mineurs », c’est-à-dire des « moins que rien ». Petit à petit ils s’y mettent et l’on raconte que quand ils revenaient le soir,
ils comparaient en riant le résultat de leurs expéditions. Et il paraît même
que St Dominique, passant un jour par Assise, fut étonné au plus haut point de
voir qu’un tel dépouillement ne leur ôtait en rien leur bonne humeur.
Extrait de Saint-François d'Assise, le Troubadour de Dieu (Texte de Aline Racheboeuf)
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