2ème étape - Jeudi 19 Août 2010 : 
Le Monastier-sur-Gazeille > Le Bouchet-Saint-Nicolas (1225 m) - 22 km

 


...Le père Adam avait une carriole, et pour la tirer une ânesse, pas plus grande qu'un chien, couleur souris,

l'oeil bienveillant et la mâchoire inférieure volontaire. L'air sobre et distingué, l'élégance de cette coquine
me captivèrent sur le champ. Modestine, (car ainsi la baptisai-je aussitôt) passa à mon service
en échange de soixante-cinq francs et d'un verre de Brandy...

...La cloche du Monastier sonnait juste neuf heures, lorsque j'en eus terminé avec ces ennuis préliminaires
et descendis la colline à travers les prés communaux. Aussi longtemps que je demeurai en vue des fenêtres,
un secret amour-propre et la peur de quelque défaite ridicule me retinrent de sourdes menées contre Modestine.
Elle avançait d'un pas trébuchant sur ses quatre petits sabots, avec une sobre délicatesse d'allure.
De temps en temps, elle secouait les oreilles ou la queue et elle paraissait si menue sous la charge
qu'elle m'inspirait des craintes. Nous traversâmes le gué sans difficultés.
Il n'y avait aucun doute à ce sujet, elle était la docilité même. Puis, une fois sur l'autre bord,
où la route commence son ascension à travers les bois de pins, je pris dans la main droite l'impie bâton
du commandement et, avec une vigueur tremblante, j'en fis application au baudet.
Modestine activa sa marche pendant peut-être trois enjambées, puis retomba dans son premier menuet..."


(Extrait de "Voyages avec un âne dans les Cévennes"   - Stevenson)
 



Stèle érigée au cœur du village du Monastier

"Du Monastier, le sentier gagne la vallée de la Gazeille, jalonnée d'anciens moulins, pour remonter sur le plateau,
d'où émergent quelques cônes au sommet arrondi (altitude moyenne de 1150 m) anciens volcans aux formes usées.
Après Saint-Martin-de-Fugères, où Stevenson s'arrêta, la descente sur Goudet offre de jolies vues
sur la rive gauche de la Loire, aux gorges très abruptes."


   
Le Chemin balisé de belles croix anciennes                                                La traversée du bois de Malaval par un chemin rocailleux

  
Le Chemin est agréable, environné de prés et de bois

 
Devant nous, un petit groupe de marcheurs venus de Montpellier


Un petit sanctuaire à  Courmarcès

 
Eglise de Saint-Martin-de Fugères (12ème siècle)

 
L'après-moisson avec ces grands cylindres de paille...   


  
Le taureau, la vache et son petit...

  
Une vue sur le village de Goudet                                                                                               Les ruines du Château de Beaufort
Il y a ensuite une montée raide et caillouteuse pendant une bonne heure jusqu'au hameau de Montagnac

 


  
Les chardons et ces milliers de fleurs des champs sur le plateau avant d'arriver au Bouchet-Saint-Nicolas

  
A la sortie du
Bouchet-Saint-Nicolas, on est admiratif devant cette statue de Stevenson
et de Modestine taillée dans une même pièce de bois


 

Hébergement  à la Chambre d'hôtes chez Andrée et Augustin Reynaud
(Le Bon accueil)
Grande chambre avec salle de bains - Très correct
 Dîner au restaurant (Mme Reynaud était un peu souffrante et n'a pu nous préparer  le repas) 
3 Coquilles

 


Extrait du Topo de Jacques Castonguay, mon ami québecois qui a fait ce Chemin en Mai 2007

De Le Monastier-sur-Gazeille à Bouchet-Saint-Nicolas

Je prends au gîte un solide petit déjeuner incluant notamment de savoureuses confitures maison avant d’entamer ma seconde
journée de marche. Après l’achat d’un pain à une boulangerie, tout comme Stevenson le 22 septembre 1878, mon départ se fait
sur une petite place de Monastier-sur-Gazeille, devant une stèle érigée en souvenir de cet évènement. Tout près, à côté
d’une fontaine, la magnifique petite église romane Saint-Jean au toit de lauzes se dresse face à la vallée où je me dirige.
La journée s’annonce belle et ensoleillée et c’est avec enthousiasme que je démarre. Après une descente, je traverse la rivière
Gazeille
où un pêcheur taquine le poisson avant de m’attaquer à une longue montée sur un sentier pierreux qui me fait traverser
le bois de Malaval. La campagne est belle et verdoyante et le temps frais rend ma marche très agréable. Des hameaux paisibles
et aux noms exotiques et accrocheurs se succèdent, Le Cluzel, Courmarcès, Le Croc, etc. Dans chacun, je remarque de vieilles
et vastes maisons et bâtiments de ferme construits en pierres volcaniques aux couleurs sombres.
Ces constructions sont intéressantes parce qu’elles sont adaptées au climat et aux conditions de vie et qu’elles utilisent
des matériaux de la région. Leurs dimensions imposantes indiquent aussi qu’aux siècles derniers, les enfants étaient
plus nombreux dans des familles plus larges, regroupant souvent trois générations.

J’arrive à un hameau plus important, Saint-Martin-de-Fugères où j’entre dans l’église à quatre cloches alignées dans leur clocher
en peigne. C’est l’Ascension et une cérémonie religieuse est en cours. Sur un mur extérieur, je photographie dans la pierre
une insolite sculpture d’un chien à la gueule menaçante et au long corps. A côté de l’église, se dresse un monument aux morts
décoré de drapeaux tricolores avec un Poilu standard figé sur un socle de calcaire. Ici, comme partout dans la campagne française,
on vénère la mémoire des enfants du pays disparus lors de deux guerres meurtrières. Poursuivant ma marche, je parviens
à un petit sommet d’où j’aperçois un des plus beaux villages de ma randonnées. Il s’agit de Goudet blotti dans une vallée
sur les rives de la Loire. Par un petit sentier de terre, je descends vers ce hameau au travers d’un véritable jardin de genêts jaunes
en pleine floraison. C’est un paysage unique et magnifique avec en prime, une vue sur les ruines du
château de Beaufort
construit sur la colline d’en face. Ces dernières ont été immortalisées par un dessein de Stevenson
qui a pris un repas à Goudet. Je passe d’ailleurs devant l’hôtel Senac où il était descendu, un établissement qui porte
maintenant le nom de l’Hôtel de la Loire. Par un pont, je franchis la Loire avant de monter par un long sentier rocailleux
et pentu en direction de Montagnac où fatigué, je me repose un peu. Face à un large troupeau de moutons,
je peux y admirer une petite chapelle bâtie en pierres brunes et rousses et coiffée d’un clocheton.

Sous un chaud soleil, je poursuis mon avancée jusqu’au hameau d’Ussel où je décide de m’arrêter pour casser la croûte.
Je trouve un petit restaurant bondé en ce congé de l’Ascension mais près du bar, une petite place est trouvée pour le « Canadien ». Affamé, j’y déguste à un prix très abordable un excellent repas, charcuterie du pays, boeuf et frites, fromage, dessert et vin.
Il est dur de reprendre la route après un tel banquet ! En sortant du hameau, je remarque un troupeau de vaches laitières
de race montbéliarde. Un fermier m’explique que ce sont des bêtes robustes et réputées pour leur lait et leur viande.
Je poursuis ma marche pour arriver au village de Bargettes pour apercevoir ensuite au loin, une trouée dans le flanc de la montagne
de Preysac. Un homme marchant avec son chien m’explique que c’est une carrière de pouzzolane, une roche volcanique rougeâtre
et poreuse utilisée pour la fabrication de ciments et d’agglomérés. Après quelques kilomètres sous un ciel noir,
la pluie débute poussée par un fort vent et c’est revêtu de mon poncho rouge que j’entre dans le petit village rural
Le Bouchet-Saint-Nicolas.
Stevenson a passé une nuit dans ce hameau comme me le rappelle une imposante sculpture en bois représentant le célèbre randonneur et son ânesse. Sous la pluie, je cherche en vain une maison ornée semble-t-il
de curieux bas-reliefs. Pour le reste, je ne trouve rien d’intéressant dans ce village.
 
 

Il y a dans les environs un plan d’eau réputé, le lac du Bouchet que je n’ai pas le temps de visiter. Au gîte où je couche,
on explique que ce lac aux eaux limpides est profond de 28 mètres, qu’il ne reçoit aucune rivière d’alimentation et que ce serait
le vestige d’un ancien cratère volcanique. Je passe la nuit chez Andrée et Augustin Reynaud qui tiennent des Chambres
et tables d’hôtes. Leur accueil est chaleureux et j’y prends un excellent dîner avec eux et un couple de Français qui me racontent
avoir gardé de bons souvenirs de sorties en traîneau à chien au nord du Québec. Ce sont toutefois des Rocheuses canadiennes
qu’ils ont gardé les images les plus mémorables. Sont aussi présents, trois jeunes gens qui comme plusieurs frontaliers,
travaillent à Genève mais demeurent en France profitant ainsi de salaires suisses plus élevés et d’un coût de la vie plus bas
en France. Le repas permet un intéressant échange et la campagne électorale en cours est bien sûr au menu.
Je note un fort support pour le Président Sarkozy et sur la nécessité d’entreprendre des réformes profondes dans ce pays.
Les propriétaires des lieux nous expliquent que leur habitation est une ancienne maison de ferme avec la grange attenante.
Comme je leur signale avoir remarqué sur ces fermes, des pentes en pierre montant à l’étage, on me répond qu’en occitan,
on les nomme des montadous. Le repas terminé, je vais me coucher et je m’endors au bruit de la pluie poussée par le vent sur les carreaux des fenêtres. Il y aura possiblement de la boue sur les sentiers demain mais « demain, c’est demain »
et je passe une nuit reposante.

 

 


Que ce soit dimanche ou lundi
Soir ou matin minuit midi
Dans l'enfer ou le paradis
Les amours aux amours ressemblent
C'était hier que je t'ai dit
Nous dormirons ensemble

C'était hier et c'est demain
Je n'ai plus que toi de chemin
J'ai mis mon coeur entre tes mains
Avec le tien comme il va l'amble
Tout ce qu'il a de temps humain
Nous dormirons ensemble

Mon amour ce qui fut sera
Le ciel est sur nous comme un drap
J'ai refermé sur toi mes bras
Et tant je t'aime que j'en tremble
Aussi longtemps que tu voudras
Nous dormirons ensemble

Louis Aragon (Le fou d'Elsa)



 

                                                                                                                                                                                                            

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