Mercredi 21 Mai 2008  -  Puebla de Sanabria > Lubian  (30,6 km)



    Toucher l'instant

    On a trempé notre plume dans notre envie de changer de vision
    De prendre une route parallèle, comme une furtive évasion
    On a trempé notre plume et est-ce vraiment une hérésie
    De se dire qu'on assume et qu'on écrit de la poésie.
    Il existe paraît-il, un instant dans l'écriture
    Qui oublie la page blanche et efface les ratures
    Un véritable état second, une espèce de transe
    Qui apparaît mystérieusement et s'envole en silence
    Que l'on rappe ou que l'on slamme, on recherche ce moment
    Il allume une flamme qui nous éclaire brièvement
    Cette flamme est la preuve, laisse moi t'en faire une démo
    Qu'il est possible de combattre le mal par les mots.

    C'est tout sauf une légende, on espère juste toucher l'instant
    Les quelques secondes du poète qui échappent à l'espace-temps
    Les moment rares et irréels que la quiétude inonde.
    Rouda, n'oublie jamais notre parole du bout du monde
    On ressent comme une coupure dans la vie, comme un rêve
    On oublie les coups durs de la vie, comme une trêve
    C'est un phénomène puissant, je ne te parle pas d'inspiration
    Mais d'un souffle plus profond comme une seconde respiration.
    On voit et on entend l'encre devenir vivante
    On goûte et on sent la saveur d'une rime errante
    On touche du doigt l'instant qui nous enveloppe de sa puissance.
    C'est sans cesse la renaissance de l'essence même de nos cinq sens
    C'est le moment où on passe de l'autre côté des paysages
    On sympathise avec le vent et on tutoie les nuages
    Il fait jour en pleine nuit et il fait nuit en plein jour.
    Profite de cet instant, il ne durera pas toujours
    C'est tout sauf une légende, on espère juste toucher l'instant
    Les quelques secondes du poète qui échappent à l'espace-temps
    Le moment où le voile se lève et la magie s'élance
    Là où j'ai croisé Souleymane au bout du sixième silence.

    Si on a pas atteint le Nirvana, on doit en être au seuil
    Pourtant je suis simplement assis là devant ma feuille
    Peut-être que cet instant n'existe que dans mon esprit
    Et que je suis complètement mythomane lorsque j'écris
    Mais laisse moi mon stylo, y'a pas moyen que je m'arrête.
    J'ai une envie d'écrire comme t'as une envie de cigarette
    Et pour m'enlever ce désir je te demanderais de repasser
    Car tant que je pourrais écrire je continuerai de penser
    Que c'est tout sauf une légende, on espère juste toucher l'instant
    Les quelques secondes du poète qui échappent à l'espace-temps
    Les moments que l'on redécouvre, que l'on connaît plus ou moins.
    Tu l'as déjà touché Jacky, j'en suis témoin
    On a trempé notre plume dans notre envie de changer de vision
    De prendre une route parallèle, comme une furtive évasion
    On a trempé notre plume et est-ce vraiment une hérésie
    De se dire qu'on assume et qu'on écrit de la poésie.


    Grand Corps Malade

     



  •                    
    De l'eau qui coule de partout.......                                                        Une ruelle dans le village de Requejo


                       
    Les chemins boueux qui finissent par laisser la place aux ruisseaux



    Heureux malgré les intempéries du jour !



    La pause-déjeuner sous le pont de la Nationale, à l'abri de la pluie avec mes 2 compagnons italiens


                       
                  Dans le village de Aciberos devant la fontaine...                           et mes amis italiens repartent vaillamment sous une petite pluie fine....


                       
    Vues sur le village de Lubian


                                                                                      
    L'église San Mamed à Lubian avec sa niche encastrée dans la façade principale                                Dîner avec 2 compagons venus de Bretagne                                

     


      La sortie de la ville est un peu hasardeuse, mais finalement je décide de marcher le long de la N-525
      que je vais suivre jusqu'à Requejo. Cela m'évite les chemins boueux du matin et des détours inutiles,
      car après la longue étape d'hier il me faut ménager mes forces. Après Requejo je retrouve le Camino qui
      passe au milieu de beaux paysages avec des torrents, des hêtres et des sapins...

      Le couple d'italiens parti avant moi ce matin, que j'ai du dépasser, me rejoint et nous nous arrêtons sous
      un pont de la nationale pour déjeuner, alors que la pluie se met à tomber. Nous arrivons ensemble à
      Padornelo après être passé au point le plus élevé de la Via de la Plata (Altitude 1300 m).
      La descente vers Aciberos est superbe. J'ai laissé les italiens partir devant.
      Un peu avant Lubian, je m'arrête au bord d'une rivière que je longe depuis un petit moment.
      Je prends un bon bain dans une eau plutôt fraiche, mais quel délice !!

      J'arrive à l'albergue de Lubian vers 15h où je retrouve les pèlerins italiens ainsi qu'un couple de français
      venus de Bretagne avec lesquels je dînerai au bar du village. Je dors dans la pièce du bas de ce refuge
      où il y a un coin cuisine, une table et 4 lits. A l'étage il doit y avoir également 4 lits.
      Une française de 70 ans est arrivée un peu plus tard à moitié éclopée,
      et je crois qu'elle poursuivra jusqu'à Santiago, moitié en bus, moitié sur le Chemin.

       

     


    Hébergement dans un petit refuge à l'entrée du village, petit mais agréable.

    2 Coquilles

     

     

       

      LE PREMIER LIVRE DE GRABINOULOR
      CHAPITRE PREMIER

      Grabinoulor s’éveille


      Ce matin-là Grabinoulor s’éveilla avec du soleil plein l’âme
      et le nez droitement au milieu du visage signe de beau temps et la
      couverture étant aimable on pouvait d’un coup d’œil se convaincre
      qu’il n’avait pas seulement l’esprit virilement dressé vers la vie.

      Cependant qu’il lavait avec joie son corps poilu il fit des bonds
      tout nu à travers bois et publia un livre puis il mit ses vêtements
      et il eut même quelques compliments de son implacable amie
      la glace qui n’a pas coutume d’en faire à la légère puis immense
      il s’en fut dans la rue où deux jeunes filles passaient à bicyclette
      donc il vit des jambes et des dessous aussi ne sut-il laquelle
      choisir or ils étaient encore tous les deux occupés à se battre
      quand les deux désirées allaient disparaître furieux alors de
      voir que la route tournait pour les prendre celui qui voulait
      la robe blanche et les cheveux noirs porta un coup si décisif
      que l’autre fut tué et tellement bien anéanti qu’il a été impossible
      de le retrouver ni dans ce monde ni dans l’autre.

      Grabinoulor est plus fort que tous les engrenages et surtout
      les jours où son nez se redresse tel que ce matin-là par exemple
      puis puis il prit la jeune fille qu’il avait choisie et continua
      son chemin presque aussitôt il en rencontra une autre qui
      marchait à pied et comme elle était seule Grabinoulor n’eut
      pas d’adversaire il la choisit donc à première vue et il allait
      toujours avec allégresse de plus en plus et quoique les ombres
      des arbres s’essayassent à lui barrer la route il passa par Paris
      où il n’eut aucune aventure parce qu’il pensait à autre chose et
      il revint immédiatement dans cette sous-préfecture océane qu’il
      habitait la ville des belles paresses mais en longeant le haut
      d’une falaise il bâtit une maison admirablement bien comprise
      pour l’hiver et l’été peinte en jaune et en vert et il n’eut pour
      cela besoin ni d’échelle ni de pots de couleurs ni de pinceaux.

      Et tandis qu’il était occupé à construire une machine pour
      transformer le mouvement de la mer en lumière électrique
      il s’étala sur le sable et faillit partir pour l’Espagne mais
      une fourmi l’en empêcha car Grabinoulor est bon et observateur
      et la fourmi avait beaucoup de peine à gravir la montagne qui
      sans cesse coulait sous ses pattes c’est alors qu’il fit un trou
      avec sa canne pour voir ce que ferait la fourmi mais il était trop
      fort il creusa trop profondément et sa canne passa de l’autre côté.

      Or comme il aimait beaucoup cette canne qui s’était
      elle-même très attachée à lui il la suivit mais comme la ville
      dans laquelle il entra était dans la plus grande obscurité et toute
      endormie et qu’il ne la connaissait pas il eut peur de ne plus
      retrouver son chemin et peut-être aussi de se faire prendre pour
      un assassin il revint donc avec sa canne tout droit de ce côté-ci
      mais le soleil s’était allongé à sa place il préféra ne pas le déranger
      et s’en fut dans l’année prochaine voir si la guerre était finie
      et quand il rentra chez lui d’un pied joyeux il dit à sa femme
      allons-nous bientôt déjeuner j’ai grand faim


      Pierre Albert-Birot
       






  • Tempête solide

    Porte-moi sur tes vagues dures, mer figée, mer sans reflux ;
    tempête solide enfermant le vol des nues et mes espoirs.
    Et que je fixe en de justes caractères,
    Montagne,
    toute la hauteur de ta beauté.

    L'oeil, précédant le pied sur le sentier oblique te dompte avec peine.
    Ta peau est rugueuse. Ton air est vaste et descend droit du ciel froid.
    Derrière la frange visible d'autres sommets élèvent tes passes.
    Je sais que tu doubles le chemin qu'il faut surmonter.
    Tu entasses les efforts comme les pèlerins les pierres : en hommage.

    En hommage à ton altitude, Montagne.
    Fatigue ma route : qu'elle soit âpre, qu'elle soit dure; qu'elle aille très haut.

    Et, te quittant pour la plaine, que la plaine a de nouveau pour moi de beauté !

    Stèles du bord du chemin  -  Victor Segalen

     

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