Mardi 15 Septembre 2015 : Avila > Gottarendura - 24 km

 


    Les écrits s’en vont...

    Le satin des pages qu'on tourne dans les livres moule une femme si belle
    Que lorsqu'on ne lit pas on contemple cette femme avec tristesse
    Sans oser lui parler sans oser lui dire qu'elle est si belle 
    Que ce qu'on va savoir n'a pas de prix
    Cette femme passe imperceptiblement dans un bruit de fleurs
    Parfois elle se retourne dans les saisons imprimées
    Et demande l'heure ou bien encore elle fait mine de regarder des bijoux bien en face
    Comme les créatures réelles ne font pas
    Et le monde se meurt une rupture se produit dans les anneaux d'air
    Un accroc à l'endroit du coeur
    Les journaux du matin apportent des chanteuses dont la voix a la couleur du sable
    sur des rivages tendres et dangereux
    Et parfois ceux du soir livrent passage à de toutes jeunes filles qui mènent des bêtes enchaînées
    Mais le plus beau c'est dans l'intervalle de certaines lettres
    Où des mains plus blanches que la corne des étoiles à midi
    Ravagent un nid d'hirondelles blanches
    Pour qu'il pleuve toujours
    Si bas si bas que les ailes ne s'en peuvent plus mêler 
    Des mains d'où l'on remonte à des bras si légers que la vapeur des prés
    dans ses gracieux entrelacs au-dessus des étangs est leur imparfait miroir
    Des bras qui ne s'articulent à rien d'autre qu'au danger exceptionnel d'un corps fait pour l'amour
    Dont le ventre appelle les soupirs détachés des buissons pleins de voiles
    Et qui n'a de terrestre que l'immense vérité glacée des traîneaux de regards sur l'étendue toute blanche 
    De ce que je ne reverrai plus
    A cause d'un bandeau merveilleux
    Qui est le mien dans le colin-maillard des blessures.


    André Breton
    In, « Le Révolver à cheveux blancs » 1932




La belle cité d'Avila encore endormie...


...et l'alchimie de l'éveil...


Avila l'emmuraillée
Thérèse en lévitation
je te contemple...





Le jour se lève...


D'autres chemins invitent le pèlerin !


Au bord du chemin, bel équilibre de rochers !


Les herbes hautes pour adoucir une nature un peu désolée !


Je me régale au passage de ces belles mûres !


Une retenue d'eau avec un petit barrage





Ma rencontre avec cet homme en train d'achever cette sculpture dans un bloc de grès


Eglise de Cardeñosa

   
Les croix jalonnent le chemin...


...mais ce n'est pas un chemin de croix !


Les vestiges de quelle construction géante ?

   
L'église paroissiale de Saint-Michel Archange du 17ème siècle à Gotarrendura


L'Albergue de Gotarrendura
 


    Je quitte l'hôtel à 7h et prends mon petit-déjeuner sur la plaza Mercado del Chico. Je sors d'Avila en empruntant le pont qui
    enjambe le rio Adaja. Il fait à peine jour. Arrivé au belvédère de Cuatro Postes je m'arrête pour admirer Avila cité radieuse
    sous les belles couleurs du soleil levant...La première partie du chemin a peu de charme, c'est un environnement de garrigue
    plutôt monotone !  Après le premier village, Narrillos de San Leonardo, l'itinéraire est partagé entre petites routes et pistes...
    Le deuxième village, Cardeñosa donne une impression de désolation, pas âme qui vive ! Heureusement je ferai quand même
    la rencontre d'un homme retraité en train de réaliser une sculpture dans son atelier. Nous échangeons quelques mots et ce
    temps de partage même assez bref  dissipera un peu ce sentiment d'un pueblo mort que je ressentais !


    Le chemin devient ensuite plus agréable. Il y a de beaux panoramas sur les plateaux que l'infini découpe sur fond de ciel bleu.
    Le troisième village est à peine effleuré et jusqu'à Gotarrendura, je vais suivre de longues pistes avec au passage quelques
    ronciers chargés de bonne mûres ! A 2 km du terme de mon étape, la pluie se met à tomber et pour la première fois depuis
    mon départ sur ce Chemin le 21 Août, je sors mon parapluie et recouvre mon sac à dos. La cape reste encore au fond de
    mon sac, car j'ai alors parié sur une pluie peu abondante !

    J'arrive un peu avant 14h à la Mairie où je reçois un bon accueil et une employée me conduit à l'Albergue après que j'ai donné
    15 euros pour la nuit et fait tamponner ma Credencial. D'après ce que j'ai compris, il y a 2 albergues : L'une, celle que j'ai
    choisie est assez confortable et ouverte aux pèlerins et aux touristes de passage, l'autre, plus basique qui fonctionne avec
    le donativo est réservée aux pèlerins.

    Comme il n'y a pas de bar ou de restaurant ouvert dans ce pueblo, l'employée de mairie m'a fait comprendre que quelqu'un
    viendrait me prendre à 19h pour m'emmener dans un village voisin pour dîner. J'attends un moment avant de voir un jeune
    homme me faire signe de sa voiture et il m'emmène donc dans un bar à 4km où l'on me sert un bon plat maison accompagné

    de quelques verres de Vino Tinto...Un peu plus tard, c'est un autre jeune qui me remmène à l'Albergue !
     



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Lien avec le commentaire "Chemin du Levant"



Hébergement à l'Albergue de Peregrinos - Clés à la Mairie - Tél. 615 65 80 68
C'est un Albergue Turistico confortable - 15 euros la nuit
(Il y a à côté un Albergue plus basique qui est gratuit (ou donativo ?)
3 Coquilles
 



    Dans la craie de l'école il y a une machine à coudre ; les petits enfants secouent leurs boucles de papier argenté.
    Le ciel est un tableau noir sinistre­ment effacé de minute en minute par le vent.

    « Vous savez ce qu'il advint des lis qui ne voulaient pas s'en­dormir » commence le maître, et les oiseaux de faire entendre
    leur voix un peu avant le passage du dernier train. La classe est sur les plus hautes branches du retour, entre les verdiers
    et les brûlures. C'est l'école buissonnière dans toute son acception.

    Le prince des mares, qui porte le nom d'Hugues, tient les rames du couchant. Il guette la roue aux mille rayons qui coupe
    le verre dans la campagne et que les petits enfants, du moins ceux qui ont des yeux de colchique, accueil­leront si bien.
    Le passe-temps catholique est délaissé. Si jamais le clocher retourne aux grains de maïs, c'en sera fini des usines même
    et le fond des mers ne s'illuminera plus que sous certaines conditions.

    Les enfants brisent les vitres de la mer à cette heure et prennent des devises pour approcher du château. Ils laissent passer
    leur tour dans les rondes de nuit et comptent sur leurs doigts les signes dont ils n'auront pas à se défaire.

    La journée est fautive et s'attache à ranimer plutôt les sommeils que les courages. Jour­née d'approche qui ne s'est pas
    élevée plus haut qu'une robe de femme, de celles qui font le guet sur les grands violons de la nature. Journée audacieuse
    et fière qui n'a pas à compter sur l'indulgence de la terre et qui finira bien par lier sa gerbe d'étoiles comme les autres
    quand les petits enfants rentreront, l'oeil en bandoulière, par les chemins du hasard.

    Nous reparlons de cette journée entre haut et bas, dans les cours royales, dans les imprimeries.
    Nous en reparlerons pour nous en taire.

     
    André Breton
    In « Poisson soluble »
     


Au belvédère de Cuatro Postes à la sortie d'Avila

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