Samedi 5 Septembre 2015 : Tembleque > Mora (25 km)

 


    Hymne au vent du Nord

    Ô Vent du Nord, vent de chez nous, vent de féerie,
    Qui vas surtout la nuit, pour que la poudrerie,
    Quand le soleil, vers d’autres cieux, a pris son vol,
    Allonge sa clarté laiteuse à fleur de sol ;

    Ô monstre de l’azur farouche, dont les râles
    Nous émeuvent autant que, dans les cathédrales,
    Le cri d’une trompette aux Élévations ;
    Aigle étourdi d’avoir erré sur les Hudsons,
    Parmi les grognements baveux des ours polaires ;
    Sublime aventurier des espaces stellaires,
    Où tu chasses l’odeur du crime pestilent ;

    Ô toi, dont la clameur effare un continent
    Et dont le souffle immense ébranle les étoiles ;
    Toi qui déchires les forêts comme des toiles ;
    Vandale et modeleur de sites éblouis
    Qui donnent des splendeurs d’astres à mon pays,
    Je chanterai ton cœur que nul ne veut comprendre.

    C’est toi qui de blancheur enveloppes la cendre,
    Pour que le souvenir sinistre du charnier
    Ne s’avive en notre âme, ô vent calomnié !
    Ta force immarcescible ignore les traîtrises :
    Tu n’as pas la langueur énervante des brises
    Qui nous viennent, avec la fièvre, d’Orient,
    Et qui nous voient mourir par elle, en souriant ;

    Tu n’es pas le cyclone énorme des Tropiques,
    Qui mêle à l’eau des puits des vagues d’Atlantiques,
    Et dont le souffle rauque est issu des volcans ;
    Comme le sirocco, ce bâtard d’ouragans,
    Qui vient on ne sait d’où, qui se perd dans l’espace,
    Tu n’ensanglantes pas les abords de ta trace ;
    Tu n’as jamais besoin, comme le vent d’été,
    De sentir le tonnerre en laisse à ton côté,
    Pour aboyer la foudre, en clamant ta venue.

    Ô vent épique, peintre inouï de la nue,
    Lorsque tu dois venir, tu jettes sur les cieux,
    Au-dessus des sommets du nord vertigineux,
    Le signe avant-coureur de ton âme loyale :
    Un éblouissement d’aurore boréale.


    Alfred DesRochers
     



Encore un beau lever de soleil pour enchanter la journée...

   
Les longues pistes au long desquelles je vais dérouler ces belles pages du Transsibérien de Cendrars


Et toujours ces grandes étendues agricoles qui semblent embrasser l'infini...


Infinitude...
Solitude...
Lassitude ?
Complétude...Béatitude...
C'est le jeu du scrabble-camino !





    



Changement de décor avec ces montagnes qui apparaissent à l'horizon


Le pèlerin solitaire...


Les ruines d'une ferme qui devait être importante


Ca y est, j'arrive sur les dénivelés le long de ces montagnes couvertes d'oliviers...





Les ruines d'un château avec ces étendues de vignes qui ne sont pas encore vendangées


L'Ayuntamiento de Mora

   
Le clocher de l'église de Mora...


...et à l'intérieur, ce beau rétable


    Je quitte la Casa Rural après le petit-déjeuner à 6h20. L'itinéraire commence par une longue piste qui déroule son tapis
    de terre caillouteuse au milieu d'une immensité de terres cultivées, sans doute des champs de céréales en attente des
    prochaines semailles...Il y a quelques vignes et des champs d'amandiers et de petites montagnes sont éclairées par le
    soleil qui rougeoie à l'horizon.  C'est le Chemin type de ce Camino de Levante, bien que les panneaux indiquent

    Camino del Sureste. D'après ce que j'ai compris, les Associations d'Alicante pour le Sureste et celle de Valencia pour le
    Levante ne sont pas solidaires, et chacune de ces 2 associations cherche sur ces Chemins à avoir un rôle prépondérant,

    alors qu'elles ont en commun au moins une dizaine d'étapes !...

    Comme j'arrive à Villanueva de Bogas, le décor change, les montagnes se rapprochent, le ciel est gris et la pluie menace...
    Je m'arrête dans un bar où je suis accosté par 2 jeunes espagnols qui ont fait quelques étapes du Camino Francés.

    C'est la fête dans ce pueblo, et la bière a dû couler à flots toute la nuit...Ils m'emmènent chez une amie Présidente de
    l'Association locale qui appose un sello sur ma crédenciale. Il est 11h30 et je continue en suivant le chemin balisé avec
    les panneaux du Camino del Sureste qui serpente au milieu des amandiers et des oliviers...
    Je fais une pause près d'une ferme en ruine. La température est agréable avec un petit air frais et je vais trouver
    quelques dénivelés ce à quoi je n'étais plus guère habitué depuis 2 semaines... Il y a des capteurs solaires au milieu des
    oliviers pour faire fonctionner des pompes afin d'arroser.


    Après un long faux-plat montant on laisse sur la hauteur un château en ruines et un peu plus loin l'Ermita de Ntra Sra.
    de la Antigua. J'aperçois alors Mora qui doit être encore à 2 ou 3km. Comme chaque jour ces derniers kilomètres sont
    épuisants et la récompense est au bout du Chemin dans un bar devant une bonne cerveza glacée !

    Je vais ensuite à l'Hostal El Toledano où j'ai pour moi seul une grande chambre à 2 lits avec salle de bains.
    Après le rite habituel de la douche, lessive, soins des pieds et repos je fais un tour dans cette localité, et mon premier
    souci est de repérer la sortie pour l'étape de demain. Je dîne sur le Plaza Mayor et je me couche de bonne heure,
    car j'ai prévu de partir très tôt demain matin pour une étape de plus de 35 kilomètres !

 


Lien avec le commentaire de Gilbert

Lien avec le commentaire "Chemin du Levant"

 


Hébergement à l'Hostal El Toledano - 8 C/. Manzaneque - Tél. 925 300 242
Grande chambre à 2 lits avec SDB - 17 euros
3 coquilles
 

 


    Liminaire

    Je suis un fils déchu de race surhumaine,
    Race de violents, de forts, de hasardeux,
    Et j'ai le mal du pays neuf, que je tiens d'eux,
    Quand viennent les jours gris que septembre ramène.

    Tout le passé brutal de ces coureurs des bois :
    Chasseurs, trappeurs, scieurs de long, flotteurs de cage,
    Marchands aventuriers ou travailleurs à gages,
    M'ordonne d'émigrer par en haut pour cinq mois.

    Et je rêve d'aller comme allaient les ancêtres;
    J'entends pleurer en moi les grands espaces blancs,
    Qu'ils parcouraient, nimbés de souffles d'ouragans,
    Et j'abhorre comme eux la contrainte des maîtres.

    Quand s'abattait sur eux l'orage des fléaux,
    Ils maudissaient le val; ils maudissaient la plaine,
    Ils maudissaient les loups qui les privaient de laine :
    Leurs malédictions engourdissaient leurs maux.

    Mais quand le souvenir de l'épouse lointaine
    Secouait brusquement les sites devant eux,
    Du revers de leur manche, ils s'essuyaient les yeux
    Et leur bouche entonnait : «À la claire fontaine»...

    Ils l'ont si bien redite aux échos des forêts,
    Cette chanson naïve où le rossignol chante,
    Sur la plus haute branche, une chanson touchante,
    Qu'elle se mêle à mes pensers les plus secrets :

    Si je courbe le dos sous d'invisibles charges,
    Dans l'âcre brouhaha de départs oppressants,
    Et si, devant l'obstacle ou le lien, je sens
    Le frisson batailleur qui crispait leurs poings larges;

    Si d'eux, qui n'ont jamais connu le désespoir,
    Qui sont morts en rêvant d'asservir la nature,
    Je tiens ce maladif instinct de l'aventure,
    Dont je suis quelquefois tout envoûté, le soir;

    Par nos ans sans vigueur, je suis comme le hêtre
    dont la sève a tari sans qu'il soit dépouillé,
    Et c'est de désirs morts que je suis enfeuillé,
    Quand je rêve d'aller comme allait mon ancêtre;

    Mais les mots indistincts que profère ma voix
    Sont encore : un rosier, une source, un branchage,
    Un chêne, un rossignol parmi le clair feuillage,
    Et comme au temps de mon aïeul, coureur des bois,

    Ma joie ou ma douleur chante le paysage.


    Alfred DesRochers - Le cycle des bois et des champs

     


Une belle oliveraie...
 

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