Vendredi 25 Septembre 2009 :  Alagon > Gallur  22 km



Rencontres

C'était sur une grande route, j'marchais là d'puis des jours
Voire des s'maines ou des mois, j'marchais là d'puis toujours
Une route pleine de virages, des trajectoires qui dévient
Un ch'min un peu bizarre, un peu tordu comme la vie

Évidemment, j'tais pas tout seul, j'avais envie d'faire connaissance
Y'avait un tas d'personnes et personne marchait dans l'même sens
Alors j'continuais tout droit mais un doute s'est installé
Je savais pas c'que j'foutais là, encore moins où j'devais aller

Mais, en ch'min au fil du temps j'ai fait des sacrées Rencontres
Des trucs impressionnants, faut absolument qu'j'vous raconte
Ces personnages que j'ai croisés, c'est pas vraiment des êtres humains
Tu peux parler avec eux mais jamais leur serrer la main

Tout d'abord sur mon parcours j'ai rencontré l'innocence
Un être doux, très gentil mais qui manque un peu d'expérience
On a marché un p'tit moment, moins longtemps que c'que j'aurais cru
J'ai rencontré d'autres éléments et l'innocence a disparue

Un moment sur mon ch'min, j'ai rencontré le sport
Un mec physique, un peu grande gueule, mais auprès d'qui tu d'viens fort
Pour des raisons techniques, on a du s'quitter, c'était dur
Mais finalement, c'est bien comme ça, pis l'sport ça donne des courbatures

J'ai rencontré la poésie, elle avait un air bien prétentieux
Elle prétendait qu'avec les mots, on pouvait traverser les cieux
J'lui ai dit j't'ai d'jà croisée et franchement tu vaux pas l'coup
On m'a parlé d'toi à l'école et t'avais l'air vraiment relou

Mais la poésie a insisté et m'a rattrapé sous d'autres formes
J'ai compris qu'elle était cool et qu'on pouvait braver ses normes
J'lui ai d'mandé tu penses qu'on peut vivre ensemble ? J'crois qu'j'suis accroc
Elle m'a dit t'inquiètes, le monde appartient à ceux qui rêvent trop

Puis j'ai rencontré la détresse et franchement elle m'a saoulé
On a discuté vite fait mais rapidement je l'ai r'foulée
Elle a plein d'certitudes sous ses grands airs plein d'tension
Mais vous savez quoi ? La détresse, elle n’a pas d'conversations

Un moment sur ma route, j'ai rencontré l'amour
J'lui ai dit tiens tu tombes bien, j'veux t'parler d'puis toujours
Dans l'absolu t'es une bonne idée, mais dans les faits c'est un peu nul
Tu pars en couille une fois sur deux, faudrait qu'tu r'travailles ta formule

L'amour m'a dit écoute p’tit, ça fait des siècles que j'fais mon taff
Alors tu m'parles sur un autre ton, si tu veux pas t'manger des baffes
Moi j'veux bien être gentil, mais faut qu'chacun y mette du sien
Les humains n'font aucun effort et moi j'suis pas un magicien

On s'est embrouillé un p'tit moment et c'est là qu'j'me suis rendu compte
Que l'amour était sympa, mais que quand même il s'la raconte
Pis il m'a dit qu'il d'vait partir, il avait des rendez-vous par centaines
Que ce soir il d'vait diner chez sa d'mi-sœur : la haine

Avant d'partir j'ai pas bien compris, il m'a conseillé d'y croire toujours
Puis s'est éloigné sans s'retourner, c'était les derniers mots d'amour
J'suis content d'l'avoir connu, ça j'l'ai bien réalisé
Et je sais qu'un d'ces quatre on s'ra amené à s'recroiser

Un peu plus tard sur mon ch'min, j'ai rencontré la tendresse
Ce qui reste de l'amour derrière les barrières que le temps dresse
Un peu plus tard sur mon ch'min, j'ai rencontré la nostalgie
La fiancée des bons souvenirs, qu’on éclaire à la bougie

Assez tôt sur mon parcours, j’avais rencontré l’amitié
Jusqu’à c’jour, elle marche toujours à mes côtés
Avec elle j’me tape des barres et on connaît pas la routine
Maintenant, c’est sûr, l’amitié, c’est vraiment ma meilleure copine

J’ai rencontré l’avenir, mais il est resté très mystérieux
Il avait la voix déformée et un masque sur les yeux
Pas moyen de mieux l’connaître, il m’a laissé aucune piste
Je sais pas à quoi y ressemble, mais au moins je sais qu’il existe

J’ai rencontré quelques peines, j’ai rencontré beaucoup de joies
C’est parfois une question de chance ou une histoire de choix
J'suis pas au bout de mes surprises, là-dessus y’a aucun doute
Et tous les jours, je continue d’apprendre les codes de ma route

…. (Moment de silence)
C'était sur une grande route, j'marchais là d'puis des jours
Voire des s'maines ou des mois, j'marchais là d'puis toujours
Une route pleine de virages, des trajectoires qui dévient
Un ch'min un peu bizarre, tordu un peu comme la vie...


Grand corps malade







 "S’ouvre le Chemin
de la vie et de la mort
matin d’automne"
  
 (Haïku de André Cayrel)




Au petit matin, je laisse mon cœur et mon esprit suivre les méandres du Rio Ebro...



Cette peupleraie a été inondée et offre de beaux reflets



Eglise baroque de la Sainte Trinité (17ème) à Alcala de Ebro



A Alcala de Ebro je fais une pause en compagnie de Sancho Panza



Les cigognes ont trouvé un bon emplacement pour mettre leur nid ...

La fin de l'étape entre Luceni et Gallur (8km) est un peu "Galère", car il faut marcher
le long d'une route où il y a pas mal de circulation, et de plus il y a un vent assez fort,
de face qui rend la marche encore plus difficile !



Arrivé au terme de l'étape, je vais demander à l'Ayutamiento s'il y a une auberge pèlerins.
On me répond qu'elle est fermée et je dois encore me résoudre à trouver une pension ou un hôtel !
Gallur est une petite ville de 3.000 habitants située au point de rencontre entre l'Ebre et le Canal Imperial.

Gallur


L'église de San Pedro du 18ème siècle
 


Je vais à l'Hostal El Colono  - Calle de la Constitucion
Petite chambre avec salle de bains et télévision pour 36 euros
(La plus chère de tous mes hébergements) Le dîner est servi à 21 h

 
2 Coquilles
 

 

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Quand on a que l'amour

Quand on n'a que l'amour
A s'offrir en partage
Au jour du grand voyage
Qu'est notre grand amour

Quand on n'a que l'amour
Mon amour toi et moi
Pour qu'éclatent de joie
Chaque heure et chaque jour

Quand on n'a que l'amour
Pour vivre nos promesses
Sans nulle autre richesse
Que d'y croire toujours

Quand on n'a que l'amour
Pour meubler de merveilles
Et couvrir de soleil
La laideur des faubourgs

Quand on n'a que l'amour
Pour unique raison
Pour unique chanson
Et unique secours

Quand on n'a que l'amour
Pour habiller matin
Pauvres et malandrins
De manteaux de velours

Quand on n'a que l'amour
A offrir en prière
Pour les maux de la terre
En simple troubadour

Quand on n'a que l'amour
A offrir à ceux-là
Dont l'unique combat
Est de chercher le jour

Quand on n'a que l'amour
Pour tracer un chemin
Et forcer le destin
A chaque carrefour

Quand on n'a que l'amour
Pour parler aux canons
Et rien qu'une chanson
Pour convaincre un tambour

Alors sans avoir rien
Que la force d'aimer
Nous aurons dans nos mains,
Amis le monde entier


Jacques Brel


 

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