Lundi 21 Septembre 2009 :   Escatron > Velilla de Ebro > Quinto   35 km



Première Soirée

--- Elle était fort déshabillée
Et de grands arbres indiscrets
Aux vitres jetaient leur feuillée
Malinement, tout près, tout près. 

Assise sur ma grande chaise,
Mi-nue, elle joignait les mains. 
Sur le plancher frissonnaient d'aise
Ses petits pieds si fins, si fins. 

--- Je regardai, couleur de cire,
Un petit rayon buissonnier
Papillonner dans son sourire
Et sur son sein, --- mouche au rosier. 

--- Je baisai ses fines chevilles. 
Elle eut un doux rire brutal
Qui s'égrenait en claires trilles,
Un joli rire de cristal. 

Les petits pieds sous la chemise
Se sauvèrent : "Veux-tu finir!"
--- La première audace permise,
Le rire feignait de punir! 

--- Pauvrets palpitants sous ma lèvre,
Je baisai doucement ses yeux :
--- Elle jeta sa tête mièvre
En arrière : "Oh! c'est encore mieux!... 

Monsieur, j'ai deux mots à te dire..."
--- Je lui jetai le reste au sein
Dans un baiser, qui la fit rire
D'un bon rire qui voulait bien... 

--- Elle était fort déshabillée
Et de grands arbres indiscrets
Aux vitres jetaient leur feuillée
Malinement, tout près, tout près.
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Arthur Rimbaud
 






Au lever du jour, l'Ebre se colore de beaux reflets et m'invite à le traverser pour prendre le Chemin
qui grimpe sur un plateau désertique après avoir longé le Monastère de Rueda.




Monastère cistercien de Notre Dame de Rueda fondé en 1181



Un peu plus haut cet ermitage abandonné...



Le Chemin passe au milieu de ces immenses champs de céréales moissonnés
qui prennent de belles couleurs avec le soleil levant.







J'arrive en vue de Sastago qui se trouve à l'intérieur d'une boucle de l'Ebre
que je vais à nouveau traverser.




Non loin du Chemin, il y a ces petites montagnes désertiques qui contrastent
avec la vallée verdoyante.




Aujourd'hui, c'est la journée des boucles et des ponts.
Je traverse à nouveau l'Ebre avant d'arriver à Alborge,
puis je contourne une grande boucle du fleuve et j'arrive à Alforque,
petit village d'une centaine d'habitants où je fais une pause sur un banc à l'entrée du village.
Je refais les pansements de mes pieds qui vont mieux.




Sept kilomètres sur ce chemin rocailleux dans un environnement désertique.
J'arrive à Velilla de Ebro vers 15h. Je bois une bière dans un bar et demande
si je peux trouver un hébergement dans ce village de 300 habitants.
La réponse est négative et je dois encore faire huit kilomètres pour aller jusqu'à Quinto.




L'église de Gelsa village d'un millier d'habitants entre Velilla et Quinto.



L'église de style mudéjar à Quinto, village de  plus de deux mille habitants,
où je trouve une chambre juste en face de cette église.




Une porte d'entrée ancienne donnant accès au cœur du village.



C'est la porte Saint Roch avec cette belle statue du Saint
 


J'ai une chambre avec salle de bains à la Pension Plaza située sur la Plaza de España,
en face de l'église, pour 25 euros. Il y a le bar et le restaurant juste en-dessous.
Le dîner est servi à 21h, c'est super bruyant mais le repas est correct (10 euros)

  
3 Coquilles
 

 


Roman

On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans.
− Un beau soir, foin des bocks et de la limonade,
Des cafés tapageurs aux lustres éclatants !
− On va sous les tilleuls verts de la promenade.
Les tilleuls sentent bon dans les bons soirs de juin !
L’air est parfois si doux, qu’on ferme la paupière ;
Le vent chargé de bruits, − la ville n’est pas loin,
A des parfums de vigne et des parfums de bière...

II

− Voilà qu’on aperçoit un tout petit chiffon
D’azur sombre, encadré d’une petite branche,
Piqué d’une mauvaise étoile, qui se fond
Avec de doux frissons, petite et toute blanche...
Nuit de juin ! Dix-sept ans ! - On se laisse griser.
La sève est du champagne et vous monte à la tête...
On divague ; on se sent aux lèvres un baiser
Qui palpite là, comme une petite bête...

III

Le cœur fou Robinsonne à travers les romans,
− Lorsque, dans la clarté d’un pâle réverbère,
Passe une demoiselle aux petits airs charmants,
Sous l’ombre du faux-col effrayant de son père...
Et, comme elle vous trouve immensément naïf,
Tout en faisant trotter ses petites bottines,
Elle se tourne, alerte et d’un mouvement vif...
− Sur vos lèvres alors meurent les cavatines...

IV

Vous êtes amoureux. Loué jusqu’à mois d’août.
Vous êtes amoureux. − Vos sonnets La font rire.
Tous vos amis s’en vont, vous êtes mauvais goût.
− Puis l’adorée, un soir, a daigné vous écrire... !
− Ce soir-là,... − vous rentrez aux cafés éclatants,
Vous demandez des bocks ou de la limonade...
− On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans
Et qu’on a des tilleuls verts sur la promenade.

Arthur Rimbaud  -  
29 septembre 1870



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